chapitre8e Vers une pensée dialectique du complexe ?

Pour autant la dialogique n'a pas fait, ne pouvait pas faire, l'ensemble du travail d'articulation entre les concepts du complexe et les catégories de la logique dialectique matérialiste. Ce travail, initié par Lucien Sève dans l'ouvrage collectif de 1998 et poursuivi par lui dans celui de 2005, n'est pas terminé. Il s'agit d'une entreprise d'envergure, qui devra devenir elle aussi transdisciplinaire. Elle pourrait s'avérer indispensable pour que la dialectique, ainsi actualisée, avec des catégories qui reflètent pleinement les rapports actuels entre l'objectif et le subjectif dans la connaissance, participe en retour à penser la révolution du complexe dans la multiplicité de ses dimensions, ce qui contribuerait à aider au développement de la révolution du complexe, face aux multiples obstacles qui l'entravent.

Cela permettra aussi de mieux définir les rapports entre pensée du complexe et pensée dialectique. Certes, la pensée du complexe s'élabore de façon plurielle, émerge en quelque sorte des multiples courants des sciences de la complexité et ne parviendra peut-être jamais à une formulation unifiée comme la pensée complexe liée à un auteur. Cependant, n'est-il pas envisageable, si la conscience de ce que la dialectique peut apporter à la pensée du complexe diffuse parmi les scientifiques en même temps que les sciences de la complexité s'imposent dans l'univers académique et dans la société, que l'on parvienne à un stade de « pensée dialectique du complexe » ?

Nous avons vu les obstacles épistémologiques, qui se présentent souvent comme des oppositions dogmatiques, là où se trouvent en fait des contradictions dialectiques. Nous allons passer en revue dans les deux chapitres suivants, les obstacles économiques et les obstacles idéologiques. Et nous verrons à quel point ces trois aspects sont dans les faits étroitement interdépendants.