chapitre9b L'économie capitaliste bride la révolution informationnelle

Lojkine a étudié comment, dans les entreprises, le maintien de la hiérarchie, lié à la volonté de toute puissance de la directions et aux volontés de pouvoir de la hiérarchie intermédiaire, ainsi que les pressions sur le rendement immédiat du travail ont empêché ou très fortement minimisé les changements d'organisation rendus possibles et nécessaires par l'automatisation et l'informatisation, ce qui conduisait déjà, dès 1990 à des contradictions (dont l'exacerbation actuelle se traduit notamment par une vague de suicides de salariés).

Il est d'ailleurs intéressant de voir comment la systémique (dont nous avons déjà noté le holisme, l'absence de dialectique et l'incomplétude de la prise en compte des concepts du complexe) peut aider à former le personnel à prendre en compte ces nouvelles données, à gérer les dysfonctionnements de l'organisation, « pour changer, changeons le relationnel » (1) sans remettre en question le rôle surplombant de la direction. De même, parmi les potentialités ouvertes par les méthodes nouvelles, Lojkine a aussi montré, que ce sont surtout celles liées au traitement de masses de données, plutôt que celles liées à la globalité des processus dynamiques qui sont favorisées, ce que nous avons noté dans les dérives des sciences du complexe (2).

Donc les potentialités de la révolution informationnelle entrent en profonde contradiction avec la propriété capitaliste et le marché.

Les mutations socio-techniques sont […] des potentialités contradictoires et non des […] conséquences automatiques d'une évolution linéaire. (3)

Aussi est-il devenu nécessaire au maintien de l'économie capitaliste de brider (biaiser et fausser) la révolution informationnelle, de la maintenir dans des limites — forcément instables et conflictuelles (4) — où elle lui est utile sans lui nuire tout au moins sur le court terme. La science en général et la révolution du complexe en particulier, sont de facto au cœur de cette contradiction.

La recherche scientifique faisait déjà partie, dans la définition de Marx, des forces productives, mais on assiste maintenant, nous l'avons vu, à une augmentation considérable des interrelations entre science et production (la techno-science) (3). La recherche scientifique est devenue un enjeu économique majeur dans les pays développés et fait l'objet d'un pilotage direct par les puissances économiques. Quelles en ont été les conséquences sur les sciences du complexe ?

Pour le comprendre je m'appuierais sur les politiques scientifiques menées en Europe et en France.